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Jeudis des fiscalistes - Marc Tournoud - Jurisprudence du cabinet - Incompétence de la DGFIP pour les prélèvements sociaux sur les revenus distribués occultes du gérant majoritaire de SARL

Le 22 septembre 2022
Jeudis des fiscalistes - Marc Tournoud - Jurisprudence du cabinet - Incompétence de la DGFIP pour les prélèvements sociaux sur les revenus distribués occultes du gérant majoritaire de SARL

Chacun sait que l’article 62 du Code général des impôts classe les rémunérations des gérants majoritaires de SARL dans la catégorie des traitements et salaires, mais que les revenus de l’espèce sont considérés, par le Code de la Sécurité Sociale, comme des revenus d’activité.

Ainsi les intéressés, de même que l’associé unique gérant d’une EURL soumise à l’Impôt sur les sociétés, sont assimilés à des salariés par le Code général des impôts, mais à des travailleurs indépendants par le Code de la sécurité sociale.

Ils sont donc affiliés de plein droit au régime des non-salariés au regard de leurs cotisations sociales, et en particulier de leurs obligations déclaratives et de paiement en matière de contributions et prélèvements sociaux (CSG, CRDS et autres).

La situation est claire en ce qui concerne les rémunérations proprement dites du gérant majoritaire de SARL : il s’agit de revenus d’activité, et c’est donc l’URSSAF qui est compétente pour l’assiette, le contrôle et le recouvrement des contributions et prélèvements sociaux (CSG, CRDS et autres).

La règle ne souffre pas non plus de discussion de principe pour les dividendes régulièrement distribués. En effet, parmi les contributions sociales sur les revenus d’activité, visées à  l’article L. 131-6, tel que modifié par l’article 11 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, figurent notamment celles assises sur les revenus distribués visés au 2 du de l’article L. 131-6 du Code de la sécurité sociale.

Depuis 2013, cet article L. 131-6 prévoit que la part des revenus distribués mentionnés aux articles 108 à 115 du Code général des impôts perçus par les assurés affiliés aux régimes des travailleurs indépendants et exerçant leur activité dans le cadre d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés, qui est supérieure à 10 % du capital social, des primes d'émission et des sommes versées en compte courant détenu en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes, est intégrée dans l’assiette des cotisations et contributions sociales des revenus d’activité.

Autrement dit, le recouvrement des contributions sociales assises sur les dividendes du gérant majoritaire de SARL relève pour l’essentiel de l’URSSAF, sauf la part inférieure à 10 % du capital et des apports en compte courant d’associé.

Reste la question des revenus distribués de manière occulte ou irrégulière, c’est à dire ceux visés aux articles 109 à 111 du Code général des impôts.

Il se pose en effet la question de savoir si ces revenus irrégulièrement distribués doivent être regardés comme des revenus d’activité (dans ce cas c’est l’URSSAF qui les contrôle), ou comme des revenus du patrimoine, pour lesquels l’assiette, le contrôle et le recouvrement de la CSG appartiennent au domaine de compétence de la DGFIP.

Dans de nombreux contentieux engagés pour le compte de nos clients, notre cabinet a fait valoir que ces revenus distribués, qui sont visés aux articles 109 à 111 du CGI,  sont  aussi visés par l’article L. 131-6 du Code de la sécurité sociale qui prévoit justement que la part des revenus distribués mentionnés aux articles 108 à 115 du CGI perçus par les assurés affiliés aux régimes des travailleurs indépendants et exerçant leur activité dans le cadre d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés, est intégrée dans l’assiette des cotisations et contributions sociales des revenus d’activité pour la part qui est supérieure à 10 % du capital social, des primes d'émission et des sommes versées en compte courant détenus en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes.

La Cour Administrative d’Appel de Lyon vient, enfin, de valider cette manière de voir, dans un arrêt FURY (CAA LYON, 20LY01058, 18 mai 2022, dans le prolongement de Conseil d’Etat, 20/10/2021, n° 440375), dont il résulte que si les revenus distribués ont en principe le caractère de revenus des capitaux mobiliers passibles de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine (relevant de la DGFIP), ceux du gérant majoritaire d'une société à responsabilité limitée doivent être regardés, pour leur assujettissement aux prélèvements sociaux, comme des revenus d'activité (relevant des URSSAF) pour leur fraction excédant 10 % du capital social et des primes d'émission ainsi que des sommes versées en compte courant.

Cette fraction entrant ainsi dans le champ des contributions portant sur les revenus d'activité, elle ne saurait être soumise à celles assises sur les revenus du patrimoine (CAA LYON, 20LY01058, 18 mai 2022).

On peut retirer de cette importante décision la confirmation que l'administration fiscale n'est pas compétente pour procéder au recouvrement des rappels de prélèvements sociaux sur les revenus distribués des gérants majoritaires de SARL et d'EURL mis à la charge des intéressés depuis les revenus de 2013.

Nous invitons donc les conseils des gérants majoritaires de SARL ou d’EURL qui auraient fait l’objet de rappels de prélèvements sociaux imposés à leur nom depuis les revenus de l’année 2013 à faire valoir ce moyen nouveau dans le cadre des contentieux en cours ou à venir lorsque les délais de recours ne sont pas expirés.

Ils pourront en effet demander  le dégrèvement des rappels de prélèvements sociaux mis à leur charge par la DGFIP pour leur fraction excédant 10 % du capital social et des primes d’émission ainsi que des sommes versées en compte courant, en soutenant que l'administration fiscale n'est pas compétente pour procéder au recouvrement de ces sommes (CAA LYON, 20LY01058, 18 mai 2022, FURY).

Certes, cette fraction des revenus distribués devrait être intégrée dans l’assiette de la CSG et de la CRDS dues à l’URSSAF sur les revenus d’activité.

Mais, en pratique, cette régularisation sera le plus souvent empêchée par la prescription. Il s’agira donc d’un gain net au contentieux, dans la généralité des dossiers en cours.

Il y a là une opportunité contentieuse à ne pas négliger.

Notre cabinet se tient donc à la disposition des contribuables et de leurs conseils, pour explorer la possibilité d’un recours dans les dossiers contentieux et les contrôles en cours qui portent sur les revenus distribués aux gérants majoritaires de SARL et d’EURL.

 

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Marc Tournoud,

Avocat associé, spécialiste en droit fiscal.

Contact : marc.tournoud@arbor-tournoud.fr