22 Octobre 2020 : Jeudi des Fiscalistes - Sophie Morand - Evaluation des biens immobiliers : une obligation de motivation pèse sur l’administration fiscale.
Cass. com. du 24 juin 2020, n° K 18-10.477
En matière d’ISF – et désormais d’IFI -, en cas d’absence de déclaration par le redevable, l’administration fiscale est tenue d'établir préalablement à un éventuel redressement que le contribuable dispose de biens taxables dont la valeur nette est supérieure au seuil d'imposition.
La mise en œuvre d'une procédure contradictoire comportant l'envoi d'une notification des bases d'imposition dans les formes, sous les garanties prévues par les articles L. 55 et L. 57 du livre des procédures fiscales, s’impose alors.
Cette même procédure doit être suivie lorsque le service vérificateur entend discuter les valeurs déclarées par les contribuables qui ont dument déposé leur déclaration.
S’agissant plus précisément du patrimoine immobilier, la valeur vénale doit être recherchée. Il s’agit du prix qui pourrait en être obtenu par le jeu de l’offre et de la demande dans un marché réel compte tenu de l’état dans lequel se trouve l’immeuble. L’étude du marché réel s’impose : l’administration fiscale utilise couramment la méthode d’évaluation par comparaison.
Cette méthode consiste à déterminer la valeur vénale de l’immeuble à l’aide de termes de comparaison constitués par les ventes portant sur des immeubles intrinsèquement similaires en faits et en droits (lieu de situation, superficie, année de construction, agencement, situation juridique du bien…).
Sa mise en œuvre est en pratique délicate, dès lors que des corrections et réajustements sont parfois indispensables. Elle peut donner lieu à des appréciations subjectives, et fait donc l’objet de nombreux contentieux avec l’administration fiscale.
Pour le respect des droits de la défense, la Cour de cassation a toujours exigé que l'administration indique dans les propositions de rectification opérées en cette matière, les termes de comparaison justifiant les rehaussements envisagés et ce avec suffisamment de précision pour que les contribuables puissent les discuter utilement.
Par cette décision, la Cour de cassation réaffirme l’obligation de motivation qui pèse sur l’administration fiscale à chaque étape de la procédure. Non seulement la proposition de rectification doit être dument motivée, mais « la réponse de l'administration aux observations par lesquelles le contribuable critique les termes de comparaison utilisés pour l'évaluation des biens taxables doit comporter les raisons qui justifient leur rejet ».
Cette décision, qui a le mérite d’exiger un véritable débat sur les termes de comparaison retenus, revêt une portée pratique significative, les services vérificateurs refusant régulièrement les termes de comparaison présentés en défense par le contribuable sans en expliciter les motifs.
Elle est d’autant plus importante que les contribuables doivent désormais avoir accès à la base « demande des valeurs foncières » qui met à leur disposition toutes les informations - prix, descriptif des biens - déclarées à l’occasion des mutations immobilières sur les 5 dernières années leur permettant de proposer éventuellement leurs propres termes de comparaison.
Contact : sophie.morand@arbor-tournoud.fr
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