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Jeudis des Fiscalistes - Geoffroy Wolf - L’administration ne prouve pas le caractère délibéré de l’omission déclarative en se référant uniquement à des événements postérieurs à la déclaration fautive

Le 20 mai 2021
Jeudis des Fiscalistes - Geoffroy Wolf - L’administration ne prouve pas le caractère délibéré de l’omission déclarative en se référant uniquement  à des événements postérieurs  à la déclaration fautive

Dans son action répressive quotidienne, il est courant que l’administration assortisse les rectifications qu’elle entreprend de la majoration de 40 % visée au 1 de l’article 1729 du CGI (majoration dite de manquement délibéré).

Les pénalités doivent être motivées et leur montant doit être indiqué en même temps que les droits rappelés lorsqu'elles sont appliquées dans le cadre d'une procédure de rectification.

D’une manière générale, la Loi (LPF art. L 195 A du Livre des Procédures Fiscales) prévoit que la charge de la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe toujours à l'administration en cas de contestation des pénalités appliquées.

Souvent, cette sanction est justifiée et correctement motivée. Mais ce n’est pas toujours le cas.

Pour établir la mauvaise foi, l'administration doit en effet apporter une double preuve, à savoir, d'une part, celle de l'insuffisance de l'inexactitude ou du caractère incomplet d’une déclaration et, d'autre part, celle de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

La motivation des pénalités doit comporter, pour être valide, un élément objectif (l’existence d’une insuffisance déclarative) et un élément subjectif, la preuve d’une intention délibérée d’éluder l’impôt.

C’est évidemment autour de cet élément subjectif que se concentrent l’essentiel des contentieux.

Ainsi, pour établir le caractère intentionnel d’une omission déclarative relevant du 1 de l’article 1729 du CGI (majoration de 40 % dite de manquement délibéré), le service doit notamment se placer au moment de la déclaration jugée insuffisante des éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt (CE décision no 342991 du 27-6-2012).

Cela signifie, par exemple, que le seul défaut de collaboration du contribuable lors du contrôle, qui est donc postérieur à la déclaration, ne peut pas être utilement invoqué pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à ses obligations fiscales.

Une décision récente du Conseil d‘état vient d’illustrer ce principe.

Dans sa décision CE no 432960 du 11 février 2021, la Haute Assemblée a en effet jugé qu’une Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en se fondant   exclusivement sur des éléments tirés du comportement du contribuable pendant la vérification, alors que ces éléments ne pouvaient en eux-mêmes justifier l’application de la pénalité.

Dans cette affaire, l’administration fiscale se bornait en effet à faire valoir l’absence de toute explication probante sur l’origine de sommes taxées d’office regardées comme des revenus d’origine indéterminée et l’absence de collaboration du contribuable lors des opérations de contrôle.

On rappellera d’ailleurs que l’absence de justification de l’origine des sommes taxées et l’importance des sommes taxées d’office dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée ne suffit pas à établir l’intention délibérée d’éluder l’impôt (CE 6-11-1995 no 125558).

Dans l’affaire CE no 432960 du 11 février 2021, l’administration n’invoquait en réalité qu’un seul motif tiré du comportement du contribuable ce qui se heurtait à la jurisprudence CE 27-6-2012 no 342991  précitée.

En motivant la sanction de cette manière, le service n’apportait pas  la preuve du caractère délibéré du manquement,  faute de se référer à des circonstances relevées au moment de la déclaration jugée insuffisante.

L’application de la majoration de 40% ne va donc pas de soi. En tous cas, elle ne présente aucun caractère automatique, et la contestation du bienfondé des  pénalités relève d’ailleurs d’une cause juridique distincte de celle du bienfondé de l’imposition à laquelle elle s’ajoute.

Ainsi, même lorsque les rappels en sont pas contestés (s’il s’agit par exemple d’une simple erreur matérielle ou d’une omission commise par inadvertance), le contribuable  redressé ne doit pas faire l’économie de l’examen du bienfondé   des majorations que le service aurait jugé bon de lui infliger.

 

Contact : Geoffroy.wolf@arbor-tournoud.fr