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Jeudis des Fiscalistes - Marc Tournoud - Exonérations de TVA des livraisons intracommunautaires : aucune disposition n’impose à un assujetti de consulter la base de données des numéros d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée

Le 17 décembre 2020
Jeudis des Fiscalistes - Marc Tournoud - Exonérations de TVA des livraisons intracommunautaires : aucune disposition n’impose à un assujetti de consulter la base de données des numéros d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée

Lors de la vérification de la comptabilité d’un vendeur de véhicules d’occasion, l’administration avait remis en cause l’exonération de TVA que l’entreprise avait appliquée aux véhicules vendus à une société Tchèque, au motif que la plupart des ventes avait été payées en espèces, et que le numéro d’assujetti européen de l’acquéreur n’était plus valide pendant les années considérées.

Les livraisons en litige correspondaient en effet à des ventes de véhicules d’occasion comptabilisées pour 314.400 euros au titre de l’année 2014 et 402.000 euros au titre de l’année 2015, mais le prix avait été payé en espèces à hauteur de 255.900 euros en 2014 et 403.500 euros en 2015. La société Tchèque était donc un client important et habituel de la société française.

L’administration considérait que la société française aurait dû, compte tenu des montants en cause et du paiement en espèces de la plupart des transactions, procéder à la vérification du numéro de taxe sur la valeur ajoutée intracommunautaire de la société Tchèque (qui n’était plus en effet valide depuis le 14 août 2013), et qu’à défaut, l’exonération des livraisons intracommunautaires ne devait pas s’appliquer.

A l’issue des opérations de contrôle, l’administration a donc remis en cause l’exonération de TVA appliquée par le vendeur aux livraisons intracommunautaires effectuées auprès de sa cliente tchèque sur le fondement des dispositions du 1° de l’article 262 ter du Code général des impôts, et mis à la charge du vendeur un rappel de la TVA française au taux de 20 % la totalité des opérations réalisées avec ce client.

A l’audience, ce contexte peu favorable a conduit le Rapporteur Public à proposer au tribunal le rejet de la requête, dans la mesure où, notamment, l’importance des paiements en espèces lui paraissait présumer l’existence d’une fraude.

Mais, après avoir entendu la défense de la société, le tribunal a renoncé à suivre les conclusions du rapporteur Public, et jugé en droit en relevant que la société française avait bien vérifié la validité du numéro de taxe sur la valeur ajoutée intracommunautaire de sa cliente au début des relations commerciales (au mois de juillet 2013) et qu’elle n’était pas tenue de renouveler cette vérification, même si le numéro a été invalidé quelques jours après. 

En effet, aucune disposition n’impose à un assujetti de consulter la base de données des numéros d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée.

Evidemment, l’administration peut établir que les livraisons intracommunautaires en cause sont fictives, en faisant notamment valoir que des livraisons ont eu pour destinataires présumés des personnes dépourvues d’activité réelle.

Mais dans cette affaire, l’administration ne contestait ni l’existence ni  la qualité d’assujetti de la société tchèque, et surtout, elle n’établissait pas que cette dernière ait participé à un circuit de fraude.

Le tribunal a donc rappelé que le droit à exonération ne peut être remis en cause que s’il est établi, au vu des éléments dont le vendeur avait connaissance, qu’il savait ou aurait pu savoir en effectuant les diligences nécessaires, que la livraison intracommunautaire qu’il effectuait le conduisait à participer à une fraude fiscale.

En l’espèce, le tribunal a relevé que la circonstance qu’une partie des paiements ait été effectuée en espèces pour des montants importants, ne suffisait pas à démontrer que la société requérante savait ou aurait pu savoir, en effectuant les diligences nécessaires, que la livraison intracommunautaire qu’elle effectuait la conduisait à participer à une fraude fiscale.

De son côté, l’administration n’alléguait aucune fraude fiscale de la part de la société Tchèque, ni ne soutenait qu’elle serait dépourvue d’activité réelle, pas plus qu’elle ne contestait la réalité des livraisons intracommunautaires effectuées en 2014 et 2015.

Dans de telles conditions, l’administration ne peut pas être regardée comme établissant que la société requérante aurait pu savoir, en effectuant les diligences nécessaires, que les livraisons intracommunautaires qu’elle effectuait la conduisaient à participer à une fraude fiscale.

Par suite, son droit à exonération ne pouvait être remis en cause.

La société a donc été reconnue fondée à demander la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 à raison de la vente de véhicules. 

L’administration ne peut donc pas se borner à reprocher aux sociétés exportatrices d’avoir négligé de procéder à la vérification du numéro de taxe sur la valeur ajoutée intracommunautaire de ses clients européens. Elle doit apporter une preuve positive de la fraude alléguée.

A défaut, les rappels ne sont pas fondés.

 

Marc TOURNOUD marc.tournoud@arbor-tournoud.fr