Jeudis des fiscalistes - Marie-Laure Mascoli - La comptabilité est un concept, la trésorerie est un fait
Pour calculer l'impôt sur le revenu, il faut notamment tenir compte des sommes imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Les sommes inscrites en compte courant d’associé sont des RCM et sont présumées être des « revenus distribués », donc « disponibles »… Ce qui les rend imposables même si le propriétaire du compte décide, volontairement, de ne pas les prélever.
Cependant, cette présomption peut être combattue par le titulaire du compte, s’il est en mesure de démontrer l’indisponibilité, en droit ou en fait, des sommes créditées.
Dans ce cas, elles ne seront pas imposables l’année de leur inscription en compte.
Le juge vient de rappeler l’administration fiscale à l’ordre sur l’appréciation du caractère « disponible » d’une telle somme…
Ainsi pour déterminer le caractère « disponible » d’une somme inscrite en compte courant d’associé, l’administration fiscale doit apprécier la situation de l’entreprise dans sa globalité, et notamment étudier son actif et son passif net : elle ne peut pas se contenter d’examiner le seul actif net.
En l’espèce, l’associé concerné redressé a contesté le redressement, en faisant notamment valoir qu’il ne pouvait être regardé comme ayant appréhendé les sommes litigieuses, la situation de trésorerie de la société rendant impossible tout prélèvement de sa part sur les sommes inscrites à son compte courant à l’exception d’une somme modique correspondant aux seules disponibilités bancaires de la société.
La CAA de Nantes, devant laquelle l’affaire a été portée, a jugé qu’il ne ressortait toutefois pas du bilan de la société, compte tenu de son actif net – et en dépit de son résultat déficitaire – que sa situation financière ait réellement rendu impossible tout prélèvement de l’associé sur les sommes inscrites à son compte courant.
Elle a, partant, considéré que le contribuable n’était pas parvenu à renverser la présomption d’appréhension des sommes.
Le Conseil d’État casse pour erreur de droit la décision de la CAA de Nantes (Conseil d’Etat du 28 septembre 2022, n°446858).
Il juge que la Cour ne pouvait déduire l’indisponibilité des sommes du seul examen de l’actif net de la société, sans se prononcer sur le caractère suffisamment liquide des éléments qui le constituaient.
Marie-Laure Mascoli,
Juriste.
Contact : marie-laure.mascoli@arbor-tournoud.fr
- avril 2023
- Jeudis des fiscalistes - Caroline Bosvy - Sur l’appréciation de la compétence de la commission des impôts lorsque le désaccord constaté est sujet à induire des questions de fait
- Jeudis des fiscalistes - Bilel Hakkar - Jurisprudence du cabinet - De l’importance de la charge de la preuve dans le contentieux fiscal
- Jeudis des fiscalistes - Sophie Morand - Jurisprudence du cabinet - Prescription du droit de reprise en matière de taxe d’aménagement, une taxe récemment aménagée
- mars 2023
- Jeudis des fiscalistes - Laëtitia Pignier - Situation des organismes sans but lucratif aux impôts commerciaux, exonération en raison de l’âge du public concerné et de la distance à parcourir pour accéder à des services similaires
- Jeudis des fiscalistes - Marc Tournoud - Livraisons intracommunautaires payées en espèces par un fournisseur dont le numéro intracommunautaire n’est plus valide... exonérées de TVA, ou pas ?